Réactions

Point de vue du SLFP Police à l’égard de l’article paru dans la revue La Conférence/février 2020 titré « Petit manuel anti-manifs à l’usage des gouvernements et de la Police »

Cet « Observatoire des violences policières en Belgique » a une histoire intéressante (et apparemment peu connue).

Le but assigné à sa mise en place sur Internet en 2013 est la démonstration de la réelle envergure de la violence policière, au prétexte que les organes de contrôle (Justice comprise) ne le font pas, voire escamotent cette réalité pour des raisons claniques. C’était ainsi détaillé dans l’introduction du site. Dès la première année d’exercice, et cela continua jusqu’en 2020, il n’a rien démontré du tout ou, plus justement exprimé, il a démontré que les chiffres émis en Belgique par les organes de contrôle tant critiqués … donnent une bonne image du phénomène.

ObsPol, c’est le nom du site, est à notre connaissance une initiative directe de la Ligue des Droits Humains, et nous avons souvenir de discussions à ce sujet avec le Président de la Ligue de l’époque, accompagné du conseiller juridique de la Ligue.

En 2020, ObsPol se voit apparemment assigner un objectif retravaillé : observer les violences policières … dans le monde.

En 2020 aussi, dès les premières mesures Covid, la Ligue des Droits Humains met en place un autre site (Police Watch) toujours avec le même objectif : déterminer la violence policière. Et les premiers résultats tombent dans les médias après quelques mois seulement avec une conclusion sans ambage : la période Covid est une période d’augmentation des violences policières ! M. Manuel Lambert, lors de la communication de cette affirmation aux médias, admet cependant que méthodologiquement, tout cela pose quelques petits problèmes. Et en effet, les sociologues, les analystes statistiques, …, en poussent probablement des cris d’horreur. Mais la nécessité de communication externe semble plus impérieuse que le respect de la méthode.

Et pour être concret, la violence par policier représente quelques 200 cas par an qui sont tous poursuivis (s’ils sont en effet étayés, c’est une règle du droit commun) et sanctionnés. On parle d’environ 96% d’usage inadéquat de la force – qui méritent qu’on analyse avec précision les éléments de la cause – et 4% de cas de violence inacceptable de la part des policier(ière)s concerné(e)s par le fait rapporté. Poser les chiffres, ce n’est pas adhérer à la réalité qu’il recouvre, et le SLFP Police condamne ces faits de violence inacceptable. Enfin, il faut retenir aussi que les collègues mènent annuellement pas loin de 11.000.000 d’interventions diverses.

Pour notre part, nous disons que le procédé employé par la Ligue des Droits Humains – puisqu’il apparaît clairement que sa direction est bien à la manœuvre de ces différentes initiatives – n’est pas le bon. Vous avez bien lu, nous ne critiquons pas le fait de la dénonciation de la violence policière, nous critiquons la stratégie mise en œuvre car, selon nous, elle ne sert en rien l’objectif visé (faire que cette violence policière diminue, voire disparaisse idéalement), car elle est : totalement, inadéquatement, improductivement frontale ; et paradoxalement violente à l’égard de la masse de personnes dans le métier de policier/ière qui n’ont rien à voir avec les amalgames gratuits qui truffent l’article.

Depuis plus de dix ans, le SLFP Police creuse le même sillon : si l’on diminue les violences à l’encontre des policier(ière)s, alors les relations entre citoyens et policier(ière)s s’apaiseront, faisant que les collègues devront moins faire usage de la force légale, emportant ainsi moins de risques d’un usage inadéquat de cette force. Les véritables actes de violence gratuite par policier(ière)s apparaîtront alors bien plus clairement à la lumière. Et nous disons qu’ils sont un arbre qui ne peut en aucun cas cacher la forêt des 13.000 faits annuels de violences contre les policiers.

Quant au fond de l’article, il est construit comme un contre-pied se prétendant « Manuel anti-manifs à l’usage des gouvernements et de la Police » mais se voulant clairement une critique de la supposée attitude actuelle de l’autorité administrative – de plus en plus répressive – qui laisserait libre cours (pousserait même) à la violence policière. Et nous l’écrivons plus haut : on use et abuse d’amalgames, d’inexactitudes, de flous artistiques pour tenter de faire la démonstration que la Belgique, par l’égarement (politiquement voulu) de sa police, glisse vers la dictature.

Nous allons donc corriger/préciser ce qui doit l’être au fil d’une lecture attentive.

Ainsi, et de manière générale, il faut remarquer que les « cas » évoqués sont :

  • Soit étrangers à la Belgique et nous n’avons aucun/très peu de moyens pour savoir ce qu’il en est exactement de ce qui est relaté ;
  • Soit vagues et bien évidemment unilatéraux, et relaté comme s’ils valaient vérité simplement parce qu’ils sont exprimés ;
  • Soit l’objet d’une enquête, voire de plusieurs enquêtes (judiciaire, administrative et/ou disciplinaire), faisant que la vérité judiciaire n’a pas encore été exprimée ;
  • Soit l’objet d’une décision de Justice, et en tel cas la vérité judiciaire est donc exprimée, mais il est à remarquer qu’il n’en est rien dit car cela ne va pas dans le sens du propos (l’affaire « Adil » est à ce sujet l’exemple le plus frappant).

Quant à la page introductive de l’article …

Dès la première page, le lecteur est immédiatement plongé dans le bain de ce discours presque caricatural tant il est orienté avec des mots tels que « les gouvernements européens et leur bras armé civil … » ; « Pressées de réagir face à ces désordres, … » ; « … ont eu de plus en plus souvent tendance à choisir la réaffirmation de « l’Etat de droit » … » ; etc. De ce qu’on peut en juger par les diverses positions médiatiques de M. Close, bourgmestre de Bruxelles et Président de la zone de police qui est la plus occupée de toutes les zones de Belgique par la « gestion de l’espace public » (appelée aussi police administrative dont il est le responsable en tant que bourgmestre), la situation et surtout la philosophie de cette autorité administrative n’est pas du tout ce que le rédacteur en dit : M. Close, par exemple, n’a qu’un mot à la bouche : « désescalade ». Et si ce mot traduit bien sa pensée qui va totalement à l’inverse du discours tenu dans cet article, ça n’est pas sans poser de problème à la police qui doit exécuter ses ordres. En effet, un élément important doit être déterminé avant chaque gestion de l’espace public : le seuil de tolérance. À savoir, la détermination du moment où la police doit/peut user légitimement (hors cadre judiciaire) de la force légale, tout en répondant à deux impératifs : subsidiarité et proportionnalité. Et très souvent, pour ne pas dire toujours, il n’y a pas de seuil de tolérance déterminé (ce qui correspond bien à la volonté de désescalade prônée). Ce qui signifie que les responsables policiers (ce qu’on appelle les Goldcommander et Silver’s) n’autorisent l’usage de la force qu’en toute dernière échéance, ou s’il y a des faits flagrants de nature judiciaire qu’il faut absolument stopper (comme par exemple : la mise à sac de tous les magasins d’une même rue).

Le renforcement des tenues ne vient pas d’une tendance politique sécuritaire, mais tout simplement d’une obligation de mise en œuvre de toutes les mesures envisageables en matière de Bien-être et de sécurité au travail, car n’en déplaise au rédacteur, les policier(ière)s sont des travailleurs qui méritent d’être protégé(e)s, et la projection d’un éclat de béton de trois kilos troue un casque de protection et provoque une commotion cérébrale.

Les armes à létalité réduite … en Belgique ?!? Il doit y avoir erreur et c’est un premier amalgame avec la réalité dans d’autres pays. Ou cet amalgame est développé par méconnaissance de l’armement policier … ou il est posé volontairement.

La mise en nasse … est le seul moyen de faire la part des choses entre citoyen(ne)s de bonne volonté et casseurs. S’il existe un autre moyen, qu’on le propose à la police. Et cette mise en nasse (ce que nous appelons l’encerclement) ne s’opère qu’à partir du moment où le fameux seuil de tolérance est atteint et dépassé, ou en cas de faits judiciaires (et par exemple, lancer des projectiles divers vers la première ligne de policier est un fait judiciaire).

Le rédacteur sort du contexte qu’il s’est lui-même donné en citant M. Fabien Jobard, car en effet, ce chercheur scientifique aborde la question des missions de police, mais dans un contexte bien plus large que la gestion de l’espace public, qui est le sujet du rédacteur. Mais encore une fois, la citation et le point de vue pêche d’une méconnaissance du cadre légal belge, s’appliquant à aborder la réalité … française.

« Sous la pression des syndicats de police, de nouvelles brigades ont été formées qui se sont illustrées par leur exploits sur-violents, … ». Voilà une affirmation qui n’est pas correcte du tout : la mise en place d’un nouveau service dans une zone de police, ou d’une nouvelle direction dans la police fédérale, relève du champ opérationnel qui n’entre pas dans les compétences des organisations syndicales. Dans le même paragraphe, une nouvelle fois, on tente de tirer une comparaison scabreuse entre la situation vécue en France durant les trois dernières années et leurs conséquences en termes d’hospitalisations. C’est très probablement par défaut de chiffres en Belgique, dès lors qu’il n’y a pas de chiffres belges notables à signaler, parce que tout simplement, la situation française des trois dernières années n’est pas comparable à la situation belge. Au passage, il est assez piquant de constater que « l’Observatoire des violences policières en Belgique » qui doit son existence à la suspicion et au doute ressentis à l’égard des organes officiels de contrôle de l’action policière … utilise des chiffres qui émanent de ces mêmes organes de contrôles. Au passage, signalons que le secteur policier français (police municipale, police nationale, gendarmerie et CRS) n’ont que deux axes de contrôle de leur action ; tandis qu’en Belgique, nous comptons pas moins de trois organes de contrôle en sus de nos chefs hiérarchiques et de la magistrature : Comité P, AIG, Services locaux de contrôle interne. N’oublions pas les édiles locaux, à la moindre plainte (qu’elle soit étayée ou pas), demandent des comptes. N’oublions pas les associations telles que l’observatoire des prisons qui p.e. peut venir contrôler nos cellules …La liste est longue de ces paires d’yeux qui sont derrière nous, au-dessus de nous, à côté de nous, par écran interposé ou pas, fortes d’un savoir technique ahurissant pour pouvoir ainsi juger dans la seconde ce qui est bien ou mal fait dans notre travail, travail que nous menons toujours en situation de crise avec des acteurs très souvent incontrôlables car dans l’émotion la plus complète.

Non, les mouvements citoyens ne se sont pas adaptés (à une supposée violence policière), mais ils ont évolué dès lors que leur message leur semblait inaudible auprès des responsables politiques démocratiquement élus. Et ils ont été – en France certainement, avec quelques tentatives en Belgique (nous allons y revenir plus loin) – dans l’action directe avec ce que cela laisse supposer de qualification judiciaire des faits … et de réactions subsidiaires et proportionnées de la police.

Quant au premier grand titre, « interdire les manif » …

L’explicatif de la préparation d’une manifestation correspond bien à la réalité, et au passage, on constate ainsi qu’il y a bien dialogue autant entre demandeur(s) et autorité administrative, et police. Mais ce dialogue doit amener à un consensus avec un équilibre droits/devoirs que quelquefois, le(s) demandeur(s) n’acceptent pas … avec pour conséquence soit une interdiction par l’autorité administrative, soit une analyse de risque policière opérationnelle concluant qu’il faut un dispositif renforcé. Cependant, il faudra qu’on nous explique la différence entre une « manifestation interdite » et une « manifestation non-autorisée ». Cela dit, toute décision d’action relève de l’autorité administrative qui est le bourgmestre. Et comme dit précédemment, le bourgmestre de Bruxelles ne peut certainement pas être taxé de droitisme échevelé, loin s’en faut et c’est tout à son honneur. Dans le texte de ce titre, le lecteur constatera qu’une manifestation ayant été interdite (ou non-autorisée, peu nous chaut finalement) ; interdiction qui fut l’objet d’un recours en extrême urgence, qui fut rejeté … ; et que malgré cela, le collectif a cependant manifesté. Et le rédacteur trouve sans doute cela tout-à-fait normal.

Nous ne comprenons pas la pertinence d’une comparaison (encore une fois) avec le cadre légal français et la réalité française. Pour notre part, nous n’en retiendrons que la communauté avec le droit belge en matière de police administrative du principe fondateur – selon nous – de la gestion de l’espace public : « … pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public. ».

Et pour souligner une nouvelle fois l’ouverture d’esprit des autorités administratives de notre pays de cocagne, nous prendrons en exemple l’autorisation donnée par M. Close – non sans prendre un risque politique personnel vu le contexte de pandémie et le nombre supposé de participants (et nous avons tou(te)s constaté combien il en a été critiqué) – à la manifestation « Black Live Matter » de début juillet 2020 qui fut un réel succès dans le respect du cadre de la préparation et dans son déroulement. Ce n’est qu’à partir de 17 :15 heures, alors que la manifestation se disloquait, que des blocks de casseurs se sont montrés et n’ont pas obéi aux steward(ess) qui, courageusement, leur demandaient de ne pas arracher les pavés de rue p.e. … Nous avons tou(te)s vu ces vidéos.

Quant au deuxième grand titre, « intimider les participant.e.s » …

« L’ampleur des dispositifs policiers, souvent sans proportion avec l’évènement lui-même … » démontre une nouvelle fois une méconnaissance totale des réalité et contraintes policières dans la gestion de l’espace public puisque la norme maximale est de 1 policier pour 4 manifestants, mais extrêmement souvent, le dispositif est (largement) inférieur à cette norme. Quant au caractère volontairement impressionnant du dispositif, visant l’intimidation … c’est encore une fois totalement contradictoire avec la philosophie des autorités administratives qui souhaitent toujours que la manifestation autorisée se déroule le plus calmement possible, même si l’analyse laisse entendre des risques de dérapages, avec des forces de police en première ligne bien souvent sans aucun protection portée et avec des forces de police équipées de protection, mais cachées pour « ne pas heurter, ni exciter » et ne pas être ainsi le (faux) motif du dérapage. Et en cas de dérapage, nous rappelons le principe de « désescalade » qui, à chaque fois, est mis en avant … sauf s’il y a des faits de nature judiciaire puisqu’en tel cas, le policier n’a pas le choix et doit mettre fin à l’infraction et identifier les auteurs.

Revenir sur la manifestation « Adil » du 27 novembre sans rien exprimer du contexte tient de l’ellipse intellectuellement malhonnête. En effet, le lecteur se rappellera qu’en avril, le décès avait été la cause d’une autre manifestation qui avait extrêmement mal tourné, choquant toute la population par sa violence contre les policiers, les institutions, les magasins. Le 26 novembre, veille de la manifestation fortement encadrée, la Justice s’exprimait en décidant du non-lieu pour les policiers concernés. Il est une évidence pour le lecteur que cette manifestation du 27 novembre devait être strictement encadrée.

Aborder la situation de la sablière à Arlon par un récit unilatéral est tout autant une ellipse intellectuellement malhonnête car tous les habitants de la province du Luxembourg le confirmeront, les personnes rassemblées sur le site étaient prêtes à passer à l’action directe. Des appels sur Facebook avaient été lancés appelant à la résistance violente et avec des prétentions selon lesquels des armes étaient disponibles … Eut-il été raisonnable d’envoyer les collègues sans un équipement à la hauteur de ce qu’ils étaient supposés avoir en face d’eux ? On peut donc ici tirer la conclusion que le rédacteur semble estimer que les policier(ière)s ne font pas partie des humains et ne méritent pas tant d’égard, vulgaire chair à canon semblent-ils être pour lui.

L’encerclement, ce que le rédacteur appelle « nasser les manifestant.e.s », a déjà été abordé précédemment. C’est une technique aussi vieille que le monde dans le cadre de la gestion d’un ensemble dans lequel différentes catégories évoluent. Et c’est une technique très souvent utilisée dès lors que le seuil de tolérance est atteint et dépassé ou que des faits judiciaires sont commis. D’ailleurs, le rédacteur n’écrit pas autre chose avec « En Belgique, les activistes bruxellois connaissent bien cette technique. Généralement en fin de manifestation, … ». Pourquoi en fin de manifestation ? Mais simplement parce que ces activistes refusent la dislocation de la manifestation et commencent des troubles à l’ordre public, ou parce que les casseurs sortent du rang pour mener leurs exactions. Et le rédacteur ensuite de faire une longue digression sur la réalité actuelle et à venir en France, tentant de convaincre sur l’anti-constitutionalité de la technique … mais à nos yeux est bien constitutionnelle dès lors qu’elle ne peut être utilisée que dans les cas évoqués ET avec l’accord de l’autorité administrative. Un avertissement préalable devrait-il être exprimé ? Une explication devrait-elle être donnée aux personnes (bons citoyens, activistes dans le refus et casseurs) enfermées dans la nasse de ce qu’il se passe et du temps que cela prendra ? Là sont deux questions qui peuvent en effet faire l’objet d’un débat utile. Une chose est certaine, les moyens spéciaux ne sont utilisés durant le déroulement de l’encerclement qu’avec l’autorisation de l’autorité administrative et si la résistance du groupe visé se fait violente.

Quant au troisième grand titre, « tabasser sans distinction » …

Les récits mis en exergue par le rédacteur posent un problème évident : le lecteur ne dispose que d’une version. La version policière est verrouillée – jusqu’au moment où la Justice s’exprime définitivement – et ainsi, les policier(ière)s se retrouvent prisonnier(ière)s d’un récit unilatéral dont on ne sait pas quels en sont les éléments vrais.

Cela dit, qu’une personne se fasse interpeller (Que signifie « être plaqué au sol » ? Être l’objet d’un fauchage puis être écrasé au sol ? Ou être amené au sol par le biais d’une technique – pour autant qu’il n’y a pas de résistance – qui est indolore ? L’usage des mots est important et relève du souvenir d’une action vécue dans une émotion évidente par les témoins) alors qu’elle s’immisce dans une action policière, c’est tout-à-fait normal car il faut s’assurer qu’elle ne représente pas un danger et il faut l’identifier ensuite pour la rédaction du procès-verbal.

Quant au fameux commissaire-divisionnaire accompagné du journaliste « gazeur », nous constatons une nouvelle ellipse intellectuellement malhonnête du rédacteur puisqu’il ne dit rien en termes de suites disciplinaires, statutaires et judiciaires données à cette affaire pour les personnes concernées. Et nous n’aborderons pas le contexte précédant la prise de vue puisqu’il est coulé dans un procès-verbal dans une procédure judiciaire. La parole policière s’en trouve donc verrouillée comme évoqué plus haut.

Nous constatons pour le reste de ce titre que le rédacteur fait de nouveau appel à sa connaissance de « faits » français en développant une version qu’il nous est impossible de contrôler.

Quant au quatrième grand titre, « ouvrir les vannes de gaz et utiliser les « armes à létalité réduite » » …

Le Pistolet à Impulsion Electrique (PIE, véritable nom de cet engin tandis que Taser était une marque) est en phase test depuis plusieurs années et les limites de l’usage se sont déjà faites montre, avec la prise de conscience de la part des promoteurs (souvent des chefs de Corps de police locale qui aiment la technologie sans s’interroger nécessairement sur la réelle plus-value … ou l’absence de toute plus-value), que l’usage de cette arme n’est pas aussi « bénéfique » qu’ils/elles le croyaient. Pour sa part, le SLFP Police a toujours été très clair dans ses communications à ce sujet : d’abord un cadre légal clair et un point de vue énoncé par le Collège des Procureurs généraux avant tout déploiement (hors cette phase test qui fut l’enjeu d’âpres débats en négociation, croyez-moi). Une chose est certaine, il n’est pas question d’un usage en gestion de l’espace public. Pourquoi le rédacteur assimile-t-il cet arme (qui n’est pas non lethal mais bien less lethal) à d’autres armements ? Méconnaissance de la matière ou volonté manifeste …

Les moyens spéciaux ne peuvent être utilisés que lorsque le seuil de tolérance est atteint et dépassé, avec l’accord de l’autorité administrative et avec avis préalable aux citoyens présents ; ou si des faits judiciaires ont cours qui imposent une intervention sans délai.

Mais à nouveau, le rédacteur compare la situation française où de l’équipement est légalement utilisé (ce qui ne signifie pas qu’il est bien utilisé) tandis que cet équipement est interdit en Belgique. Nous croyons qu’une nouvelle fois, la comparaison n’est pas gratuite.

Qui a vu les images portées par tous les médias de la manifestation « Pour Ibrahima et contre les violences policières » (il suffit de quelques clics sur Internet pour les [re]voir) – alors que la vérité judiciaire n’a pas encore été exprimée dans quel que sens que cela soit – comprend aisément que les exactions d’une bande de criminels (car lancer un cocktail molotov est qualifié incendie criminel) devaient être arrêtées avec la mise en œuvre de moyens proportionnels au climat d’insurrection qu’ils ont créé eux-mêmes et volontairement (car ils étaient préparés, n’en doutons pas) ? Et il est heureux qu’aucun policier n’ait sorti son arme de poing car en certains moments, la situation aurait justifié un tir réel. Et tous les boutefeux devraient prendre conscience qu’ils/elles poussent des décérébrés à des actes d’une haute dangerosité. Quoiqu’il en soit, ce dernier élément démontre à quel point les policier(ière)s habituellement chargé(e)s de la gestion de l’espace public, et tou(te)s les autres qui sont venu(e)s en renfort au fil de la dégénérescence de la situation, sont conscient(e)s de cet impératif : réagir subsidiairement et proportionnellement.

Quant au cinquième grand titre, « arrestations administratives & fichages » …

Les trois exemples d’évènements repris par le rédacteur ont été abordés précédemment et justifiaient pleinement les arrestations administratives (et pour certaines, judiciaires).

La Banque de données policières, et les accès (login) aux données qu’elle contient, sont l’objet d’une surveillance à l’instar du lait sur le feu. Une commission spéciale relevant directement de la Chambre et de sa Commission Intérieur veille au grain en procédant à des contrôles réguliers. Les citoyens peuvent s’adresser à cette commission pour savoir, par exemple, si leurs données privées ont été consultées. Les policier(ière)s qui ont procédé à des consultations sans motif valable (à savoir un numéro de procès-verbal initial ou subséquent) doivent se justifier disciplinairement, et parfois même judiciairement en fonction de l’usage fait des données ainsi consultées.

Pendant l’arrestation (administrative et/ou judiciaire), il ne peut être question de traitements dégradants, assimilables à de la torture, tels que ceux qu’évoquent le rédacteur : privation d’eau, de nourriture, fouille à nu (ici, une différence existe entre l’arrestation administrative pour laquelle la fouille à nu est interdite, et l’arrestation judiciaire qui peut avoir à justifier une telle fouille en fonction du motif d’arrestation, cette fouille étant alors décidée par un Officier de police judiciaire OPJ), … Les articles 28 § 1 et 28 § 2 de la Loi sur la Fonction de Police sont sans équivoque. Visiblement, le rédacteur ne les connaît pas … ou fait une nouvelle fois un amalgame avec une situation française différente car le droit y est différent.

Quant au sixième grand titre, « frapper les manifestant.e.s au portefeuille » …

La décision d’une amende ne relève pas de la police, et doit être soutenue par un procès-verbal de police judiciaire ou de police administrative. Le/la citoyen(ne) concerné(e) peut toujours faire opposition de cette décision.

Quant aux septième et huitième grands titres, « Mentir ou méconnaître le droit de filmer la police » et « supprimer les images incriminantes »

En effet, tout le monde peut filmer l’action policière. Mais peut-on le faire n’importe comment, n’importe quand, pour n’importe quoi, et pour n’importe quelles fins ?

Ainsi, est-il opportun de s’approcher à moins de deux mètres d’un dispositif d’arrestation ? Au-delà du fait que le/la vidéaste (même s’il est journaliste accrédité [mais montrant tardivement la carte de légitimation]) se met inutilement en danger ainsi que tous les autres acteurs de la scène (imaginez que la personne interpellée sorte subitement une arme de poing et tire dans toutes les directions, ou qu’une autre personne voire le « vidéaste » lui-même agisse ainsi), la qualité des images sera toujours exploitable à plusieurs mètres qui seront ainsi une distance de sécurité pour le/la vidéaste entre autres, et cela préservera l’espace de travail pour les collègues, sans nuire à leur concentration/attention et sans aucun énervement de part et d’autre.

Est-il opportun d’assommer les collègues de commentaires juridico-fantaisistes ? Signaler aux collègues en action le motif de votre initiative peut avoir un effet de détente mais il ne nous paraît pas du tout utile de commenter l’action, quoiqu’on puisse en penser. C’est après l’action policière que les débats peuvent se dérouler en un cénacle fait pour cela, et ce n’est pas la rue.

Peut-on filmer tous les acteurs de la scène ? Il faut en effet aussi penser au droit à l’image de la personne interpellée. L’article 35 de la Loi sur la Fonction de Police est clair : « Les membres du cadre opérationnel ne peuvent, sans nécessité, exposer à la curiosité publique les personnes. Ils ne peuvent soumettre ou laisser soumettre ces personnes, sans leur accord, aux questions ou aux prises de vues de journalistes ou de tiers étrangers à leur cas. Ils ne peuvent, sans l’accord de l’autorité judiciaire compétente révéler l’identité desdites personnes sauf pour avertir leurs proches. ». C’est cet article qui justifie la prise d’identité des vidéastes par les policiers concernés : tout simplement parce qu’il ne peut être fait usage (qui serait dés lors punissable et pour ce faire, il faut identifier) des vidéos montrant le visage de la personne interpellée ; ou par ailleurs pour le cas où la scène contient un élément litigieux et il est nécessaire de rassembler tout le matériel vidéo existant pour que la vérité judiciaire puisse être dite. Il est à remarquer qu’autant le rédacteur de l’article que la Ligue des Droits Humains dans ses différentes plaquettes « Vos droits » ne parlent pas/jamais de cet article dont l’obligation de respect est la source d’une montée en nervosité bien inutile et préjudiciable de tous les intérêts par pure méconnaissance du/de la vidéaste. Mais pourquoi ne jamais mentionner cet article et le devoir citoyen qu’il porte, cela servirait utilement à la détente dans les relations citoyen(ne)s-policier(ière)s ?

En conclusion, les policiers ont le droit de vous identifier si vous décidez de filmer, cette identification n’est pas orientée contre le/la vidéaste mais pour le respect de l’article 35 LFP ou pour l’alimentation ultérieure de matériel vidéo utile à la manifestation de la vérité judiciaire. Par contre, ils ne peuvent pas s’opposer à la prise de vue les visant ET ils ne peuvent certainement pas « saisir » le support pour en effacer les éléments enregistrés.

Quant à l’usage ultérieur, il apparaît clairement qu’il ne peut s’envisager que dans le cadre d’un débat en Justice. Les médias sociaux n’ont pas vocation à rendre la justice. Et il nous paraît qu’une personne qui filme une action policière, s’enfuit lorsqu’on lui demande de s’identifier, puis poste la vidéo sur un média social ne vise en aucune façon les objectifs défendus par les Démocrates à l’égard de la rectitude de l’action policière. Ces personnes visent en effet un tout autre objectif et nous développons une hypothèse à ce sujet dans notre conclusion.

Quant au neuvième grand titre, « freiner le déploiement de bodycams et de caméras de surveillance dans les commissariats » …

Le frein syndical – de certaines organisations syndicales dont le SLFP Police – ne vise pas à ralentir les moyens de preuve de violence par policier, mais bien à garantir l’utilité réelle de ce moyen de plus pour nous contrôler (ou pour diminuer la violence contre les policier(ière)s, comme le soutiennent les ardents défenseurs de ce matériel, sans aucune base scientifique).

D’une part, nous doutons des capacités techniques de ces si petits supports vidéo pour que leur production soit bien utile à la manifestation de la vérité judiciaire dans un Tribunal ou une Cour. Un combat au corps à corps sera un assemblage de bras et de jambes qui passent sans que l’on sache qui fait quoi (ou très difficilement). Le passage entre lumière et obscurité est géré de manière très simple rendant des images momentanément peu lisibles … Nous craignons même que ce genre de matériel vidéo fera que la vérité judiciaire sera plus difficile à rendre pour le Juge de fond.

D’autre part, nous savons dès à présent qu’il y aura un problème avec la prise de son dès lors que celle-ci n’est possible légalement que dans le cadre d’une méthode particulière autorisée par un juge d’Instruction. Nous savons aussi qu’il y aura un problème avec la prise d’image de personnes qui n’ont rien à voir avec l’action, comme des mineurs précisément, ou des collègues qui ne sont pas concernés par l’action. Enfin, nous savons qu’il y aura problème avec le buffer de ces dispositifs, qui reprend plusieurs dizaines de secondes de vidéos prises avant l’avertissement oral et l’enclenchement par le policier/ière en les intégrant à la vidéo « preuve ».

Et cette position est très bien connue de l’autorité, comme d’organes officiels comme la COC, comme d’associations telle la Ligue des Droits Humains. Aussi, réduire notre réserve à une simple intention méchante visant à freiner les moyens de contrôle n’est évidemment pas correct de la part du rédacteur.

Quant au dixième grand titre, « Proposer une loi taillée sur mesure » …

Cette loi « taillée sur mesure » ne nous est pas connue dans le détail, dès lors qu’elle ne concerne pas les policier(ière)s belges.

Cependant, d’avoir vu et entendu le Premier ministre français de l’époque exprimer à l’Assemblée Nationale le contenu de ce projet, et surtout le contenu de l’article critiqué, il nous paraît qu’il n’y avait pas interdiction pure et simple de filmer les collègues français en action, mais bien de faire un mauvais usage – un usage violant leur droit à l’image et leur réputation – dans le sens de l’intention méchante, sans qu’il n’y ait aucun intérêt démocratique à la diffusion de ces images.

Et n’est-ce pas un droit humain des policier(ière)s que de se voir garantir au préalable de l’usage des photos/vidéos de leur action (bonne ou mauvaise) la démonstration de l’utilité de cet usage ?

Nous développons le cadre légal belge actuel dans le chapitre précédent, et le lecteur aura saisi que notre cadre légal n’est pas bien différent de celui que les politiques français voulaient mettre en place – selon notre connaissance – mais le lecteur aura saisi qu’en tout cas, notre cadre légal n’interdit pas l’exercice du devoir Démocratique pour qui veut se comporter comme un citoyen responsable plutôt que comme un chevalier blanc amateur.

Quant au onzième grand titre, « affirmer que la police n’a fait que son devoir » …

L’article ici même critiqué démontre que l’assertion du rédacteur n’est pas conforme à la réalité du tout : « La manière dont est rapporté un incident policier, … ne reprend que trop régulièrement le son de cloche de la police. La presse cite généralement les déclarations fournies par les services de police sans plus creuser … ». Pendant douze pages, le rédacteur développe un argumentaire unilatéral dans lequel la version de la police – pour autant qu’elle puisse en avoir une – n’a aucune place.

Le presse, quatrième pouvoir, en prend pour son grade et va tout aussi mal que le pouvoir politique (législatif et exécutif dans le même sac) et que la police, « bras armé civil ». Mais la Justice doit aussi être frappée de suspicion puisque « la Justice (NDLR : et tous les magistrats) qui n’est pas exempte de ces préjugés. ».

Sauf que ce n’est assurément pas conforme à la réalité car en effet et en majeure partie des cas, la police ne peut rien (ou très peu) exprimer sans autorisation, soit de l’autorité administrative, soit du pouvoir judiciaire. N’en déplaise à tou(te)s ceux/celles qui hurlent avec les loups, l’ignorance du contenu de la vidéo par certains décideurs de la hiérarchie policière dans l’affaire Chovanec est bien une réalité et illustre le résultat d’une décision d’embargo par le magistrat compétent (décision que nous ne critiquons pas mais dont nous évoquons les conséquences qui ont mis en ébullition les médias et une certaine partie de la population ignorante de ce cadre légal).

Dans le corps de l’argumentation pour ce titre, on doit constater que le rédacteur bafoue sans honte la vérité judiciaire puisqu’il remet en question le résultat de jugement de 1ère Instance ou d’ordonnance de Chambre du Conseil. C’est à se demander s’il a bien intégré les notions de l’état de droit … et de devoir, à savoir que si la vérité judiciaire est exprimée, on est prié de la respecter, qu’elle nous plaise ou pas.

Notre conclusion :

Il faut tout d’abord constater que c’est un pseudo collectif qui prend la responsabilité de cet article, et pas une personne de chair et de sang. Il est étonnant que personne dans ce collectif n’ait le sens des responsabilités et le courage de l’opinion exprimée.

Il faut constater que le contenu de l’article est essentiellement Bruxelo-centré ET axé sur une seule des missions de la police : la gestion de l’espace public. Il est vrai que Bruxelles vit une majorité des mobilisations nécessitant une action policière dans cette mission précise, soit environ 1.000 fois par an … pour 11.000.000 d’interventions policières de diverses natures par an et pour tout le pays. Ce faisant, tout ce qui n’est pas Bruxellois semble échapper à la vue du rédacteur (sauf ce qui se passe en France), et toutes les autres missions de police qui servent journellement les citoyen(ne)s passent visiblement en-dessous de son radar. C’est un des éléments majeurs du rejet par les policier(ière)s des considérations tant du rédacteur que de la Ligue des Droits Humains : à tant d’outrances limitées, ils/elles se ferment. Et c’est le plus étonnant dans la démarche de ces Démocrates, c’est de ne pas encore avoir compris qu’ils/elles prenaient le problème par le mauvais bout en se limitant à taper sans cesse sur le même clou … qui ne concerne que trop peu de collègues pour intéresser la masse des autres. Une telle obstination contre-productive fait penser à la mouche du coche, qui croit que ses piqûres aux chevaux font avancer le coche. Et vous aurez compris qui sont les chevaux.

Nous ne nions pas les dérapages individuels et nous faisons tout ce qui est en notre mesure (et selon notre vision de la bonne méthode) pour les réduire, mais citant M. Rosanvallon, prétendre que notre Démocratie prend des « tendances technocratiques mâtinées d’un penchant liberticide », comme prétendre que les violences policières en Belgique sont un phénomène systémique, ce n’est la réalité en aucune façon. La Belgique n’est pas une dictature en devenir et la police (mais surtout les policier(ière)s) n’est pas prêt(e)s à participer à une telle dérive.

En toute chose, il faut chercher le mobile, le pourquoi d’un tel cri à l’incendie alors que rien ne brûle ? En effet, nous ne voyons pas ce qui motive un tel article duquel sourd la méchanceté contre le métier de policier/ière à force de tenter de faire une démonstration reposant sur des amalgames, des inexactitudes, des flous artistiques maintenant démontrés. Ainsi, il n’est pas anodin que la police et les policier(ière)s aient été victimes d’un bashing de la fin mars à début juillet 2020, en plein développement de la pandémie. Certains souhaiteraient ardemment que ce bashing renaisse. Car de quelque bord extrême que l’on soit, on utilise le même petit manuel de la déstabilisation qui dans ses premiers points exprime « Mettre en exergue la répression brutale que ne manquera pas de commettre le régime en place. », c’est-à-dire déstabiliser la police pour ensuite déstabiliser l’autorité administrative. Si certains s’adonnent volontairement à cette méthode, et avec un but potentiellement dévastateur pour notre Démocratie, d’autres – dont nous sommes convaincus que la direction de la Ligue des Droits Humains et autres associations font bien partie – participent de manière inconsciente à ce lent délitement, au creusement de ce fossé entre citoyen(ne)s et policier(ière)s qu’ils prétendent ensuite vouloir combler à coups de propositions de formations diverses et variées des policiers, de renoncement à des techniques et tactiques d’intervention sans aucune proposition d’alternative et surtout sans aucun fondement scientifique, … C’est un jeu dangereux – car il fait énormément de mal à l’image de la police dans l’œil des citoyen(ne)s, mais surtout au moral des policier(ière)s et à leur motivation à s’investir corps et âmes dans le service policier aux citoyen(ne)s – et nous appelons tous les Démocrates à en prendre conscience, à ne plus se laisser berner.

Mais nous invitons aussi tous les Démocrates à crier fort et clair avec le SLFP Police leur refus de violence contre les policiers, participant ainsi positivement au travail de notre organisation, travail qui n’a rien de corporatiste mais est bien une œuvre profitable à l’ensemble de notre société.

Pour le SLFP Police,

Vincent GILLES

Président national